Hip Hop et féminisme : oxymore ou pléonasme ?
- Gie
- 31 janv. 2017
- 3 min de lecture
Dans un monde empreint de clichés machistes et de caricatures parfois simplistes de la femme, peut-il y avoir une place pour le féminisme dans le rap ?

Commençons par cesser de vouloir donner une définition universelle au féminisme. Beaucoup de femmes (de par leur éducation et leur culture) n’ont pas la même façon de l’exprimer mais sont pourtant de ferventes militantes des droits des femmes.
A l’image de Maria Hidrissi et son hijab, qui défend le fait que le voile n’est pas seulement un signe de domination masculine mais aussi une affirmation choisie par les femmes, ou encore Lil Kim,papesse du Hip Hop qui a ouvert la voie (mais aussi la voix) à la femme féminine dans le rap grâce à un style qui empruntait justement tous les stéréotypes véhiculés par ses compères masculins (et ce, sans oublier son flow légendaire).
Alors est-ce qu’une femme qui écoute Taylor Swift est-elle plus concernée par l’égalité des sexes que celle qui écoute Biggie ? Définitivement non.
Et si ce qui déplaisait dans le rap n’était pas tant ce qu’il se disait mais qui le disait?
Né dans la rue, le Hip Hop est une expression contestataire, une contre culture qui n’a jamais mâché ses mots. Un côté dérangeant pour certain. Pourtant soyons francs, la chanson de variété et la culture Yéyé n’ont jamais été moins misogynes que le Hip Hop (cf l’article de Libération : « De Ferré à Orelsan, brève chronologie du sexisme dans la chanson française. »).
Alors pourquoi montrer principalement du doigt les rappeurs ? N’est-ce pas parce qu’ils viennent d’une catégorie sociale dite « moins convenable » ? Triste hypocrisie venant de médias qui depuis notre enfance nous construisent un imaginaire collectif où l’image femme est très réductrice…
L’égalité des sexes n’est pas seulement l’affaire des femmes, bien heureusement. Dans le rap, certains hommes aussi sont de grands défenseurs de la gente féminine. Elles sont souvent l’inspiration première de leurs lyrics, à l’image du rappeur français Médine dans son titre “A l’ombre du mâle” ou encore du dernier album de Mac Miller “Divine feminine”.
“J’ai mis de l’eau pas dans mon vin mais dans mes vers Pour celles que l’on juge qu’entre les oreilles et les ovaires Je ne ferai pas mieux que le Miss Maggie de Renaud J’n’ai pas le charme, ni la vocation de Julio Mais, une chose est sûre derrière chaque homme une femme existe” Médine – A l’ombre du mâle.
Alors non, le rap n’est pas plus misogyne que la société en général (monde du travail, sport...), il a vu naître, au contraire, de nombreuses artistes qui ont inspiré et encouragé toute une génération de jeunes filles, à l’image d’Eryka Badu (qui se dit même, ne pas être que féministe mais humaniste), Queen Latifah, Lauryn Hill ou de la nouvelle et prometteuse génération d’artistes comme Little Simz, Dee MC, Reverie ou encore Princess Nokia… Le Hip Hop comme exutoire, comme revendication, l’un des plus grands mouvements du XXIe siècle, qui a donné la voix à ceux que nous n’écoutions pas.
Féminisme et rap sont donc bien compatibles, ce qui ne l’est pas, à l’inverse, c’est l’étroitesse d’esprit. On pourrait parler également du rap et de l’homosexualité, encore très peu abordée, elle commence à se faire une place de plus en plus décomplexée grâce à des artistes qui ont osé affirmer leur sexualité (Frank Ocean et Syd the Kyd) ou avec des mouvements revendiquant la culture Queer et le Voguing comme les artistes Mykki Blanco, Le1f (clip Wut à voir ici).
Le Hip Hop, comme toute culture est vaste et paradoxale, aussi, il appartient à chacun de trouver le chemin qui lui semble le plus juste.
Cet article est aussi publié sur le blog 8.6 mesures
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